Article écrit par François Genest le 2 août 2013 et publié dans la Cité d'Athéna le 20 septembre 2013. Reproduction du texte autorisée. Permission requise pour les photos [à venir, peut-être].
L’automne
prochain verra le deuxième anniversaire du mouvement du 15 octobre. On se
souviendra qu’en 2011, dans la foulée des soulèvements populaires des pays
arabes et inspirées par les rassemblements autogérés des Indignados espagnols, des milliers de personnes ont choisi de montrer
leur solidarité avec un campement établi à Zuchotti Park — une action directe
et non violente dont les participants avaient maille à partir avec les
autorités — en formant elles-mêmes des occupations à travers le monde. Le campement autogéré de New York, établi le
17 septembre 2011, reçut le surnom «Occupy Wall Street» de la publicité éponyme
du magazine Adbusters. Le mouvement du
15 octobre donna naissance à une multitude d’occupations d’espaces publics,
chacune reprenant le nom «Occupy» suivi du nom de la ville où se situait
l’action.
Le
15 octobre 2011, je me rappelle m’être rendu sur le site du campement «Occupons
Montréal», plutôt sceptique quant à l’efficacité de ce moyen d’action. C’est au
cours de la première assemblée générale que le square Victoria fut
rebaptisé : «Place du peuple». J’ai d’abord cru qu’il y avait des
organisateurs ayant un plan d’action bien défini, mais non divulgué. Puis,
voyant que les occupants tenaient bon après plusieurs jours, je me suis impliqué
dans un comité, histoire de voir si je pouvais apporter mon aide autrement qu’en
faisant un don. Très rapidement, je me suis rendu compte qu’il n’y avait à peu
près rien de planifié et que ceux qui faisaient des choses bien visibles comme de nourrir les gens et
d’animer des assemblées — et donc susceptibles d’être des meneurs inavoués — apprenaient
ce qu’ils faisaient au fur et à mesure, tout en le faisant.
Tel
qu’affiché, il s’agissait bel et bien d’un «territoire autogéré», au vu et au
su de tous les passants du quartier des affaires. Pour leurs idées, les
occupants s’inspiraient des connaissances partagées — celles-ci en assemblée
formelle, celles-là en s’activant ou dans
un moment de détente — et des expériences vécues en commun face à l’adversité.
C’est
donc en m’impliquant que je suis devenu un observateur critique du mouvement,
comme tant d’autres participants — tous, peut-être. Plusieurs ont constaté que les
campements connaissaient des problèmes semblables à ceux de Zuchotti Park, selon
une progression en accord avec l’âge des occupations.
Il est clair pour moi que l’histoire du mouvement Occupy est riche en enseignements sur l’auto-organisation sociale.
Cette
histoire est-elle terminée? Ça dépend à qui vous posez la question. Si vous
avez observé le mouvement de loin, vous l’avez vu disparaître en même temps que
ses manifestations visibles. Toutefois, pour peu qu’on pose la question à celles
et à ceux qui sont passés par les campements, il existe une multiplicité de
perceptions quant à la teneur des événements depuis le 15 octobre 2011.
Une
question plus intéressante, maintes fois posée dans les discussions du
mouvement, est la suivante : «Qu’est-ce qui vient après l’indignation?» Lorsque
les Indignés sont rassemblés autour d’une vision commune sur les causes des
problèmes économiques, politiques et environnementaux, comment peuvent-ils y
remédier? Des centaines de personnes sont venues aux assemblées proposer des
solutions, chacune attendant patiemment son tour pour les offrir au mouvement. Si
rien de spectaculaire n’en est issu, je
me rends compte aujourd’hui que cette générosité en soi est déjà une réponse.
Je
ne pourrai pas être à la place du Peuple le 15 octobre prochain — je serai
occupé ailleurs — mais ce n’est que partie remise : je reste profondément
attaché aux autres participants du mouvement. Pour moi, l’histoire se poursuit
dans de petites actions concrètes, au fil des rencontres avec les autres
promeneurs qui arpentent, comme nous, la rue de la Dignité.
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