samedi 30 avril 2011

L'abstention en question

30 avril, jour J-2.
À ma droite, les érables bourgeonnent accompagnés du chant des oiseaux par un beau samedi ensoleillé. À ma gauche, les papiers d'impôts traînent sur le plancher. J'ai encore du pain sur la planche avant de pouvoir profiter de la journée, mais je veux prendre quelques minutes pour jeter sur l'écran des réflexions sur l'élection. Les jeux sont faits, ce sera fini après-demain et les bénévoles vont maintenant mettre tous leurs efforts à faire sortir le vote.
C'est important de voter. Quand on dit que voter est un devoir civique, ça ne veut pas dire qu'on s'expose à des sanctions officielles comme une amende ou une peine de prison. J'ai lu, je ne sais plus où, qu'il y a des pays où le vote est obligatoire et d'autres où les électeurs sont payés pour se rendre aux urnes. Je préfère notre système, où l'acte de se déplacer pour voter a une signification claire pour tout le monde. Notre système n'est pas à l'abri de pressions de la part des partis, mais au moins chaque bulletin de vote est déposé par une personne physique différente et «faire sortir le vote» est bénéfique pour l'ensemble de la société.
Mais voter pour un représentant politique ne doit pas être une corvée. Le vote est un devoir civique parce que c'est un exercice du pouvoir que nous avons tous individuellement et que nous déléguons temporairement à des élus. Nos élus nous représentent. Lorsqu'on dénigre des personnalités politiques, et il ne faut pas l'oublier, on s'attaque à nous-mêmes. Voter est un devoir parce qu'on le fait pour le bien commun.
Mais ne pas se prévaloir du droit de vote est aussi un acte légitime. L'abstention est un désaveu du système politique en place et un taux d'abstention élevé indique que quelque chose doit être corrigé. Mais par qui? Voila la question. Voila le paradoxe de la politique.
Collectivement, le devoir civique commande à la société de faire tout en son pouvoir pour rétablir la confiance de la population envers ses élus. Sur le plan individuel, tout dépend de la situation politique. Parfois, il suffit de  consacrer du temps et de l'énergie à  créer de nouvelles structures rassembleuses, comme de nouveaux partis. D'autres fois, ceux qui détiennent le pouvoir ne veulent plus le lâcher et alors il faut changer complètement l'organisation de la société.
Ma solution préférée, c'est la moins évidente de toutes. Il s'agit d'enseigner la politique à tous les citoyens. Le marasme social actuel fait en sorte que la majorité des citoyens ne savent plus en quoi consiste le travail d'un parlementaire, ni pourquoi nous avons un tel système en place. Le désir de changement de la population se transforme alors en dégoût pour la classe politique et des propositions radicales deviennent populaires et sont reprises par les partis. Des citoyens qui ont appris la politique sont mieux en mesure de comprendre les implications des changements qui leur viennent à l'esprit.
Évidemment, l'éducation, ça ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut y mettre le temps et inscrire ça au programme d'études obligatoires. Et en tout premier lieu, il faut convaincre la population que c'est bénéfique à long terme pour la société. C'est pour ça qu'il faut enseigner l'histoire, les expériences politiques de l'Antiquité et du monde moderne. Pour éviter de perpétuer les mêmes erreurs. Il faut aussi que les élites en place partagent ce même désir d'améliorer tous les citoyens. Les médias, les intellectuels, les politiciens, les groupes de pression, tous doivent adhérer à cette vision volontairement et sans contrainte. C'est pourquoi c'est la solution la moins évidente. Mais je suis persuadé que c'est la meilleure.
En résumé, allez voter lundi pour garder notre démocratie en santé et non pour vous décharger de votre devoir. Allez voter de bonne grâce. Sinon, soyez prêts à vous investir en politique et à y consacrer tous vos efforts.
Si vous êtes paresseux comme moi, vous irez donc voter. ^_^
François Genest
Twitter: @FGenest

2 commentaires:

  1. Pourtant, en enseigne la politique au Québec. Les nombreux cours d'histoire au secondaire, les cours d'éthique, la philo au cégep. À mon avis, il faut trouver une autre piste pour la solution.

    Je ne baise pas mieux à cause de mes cours de sex au secondaire. l'éducation a une limite dans l'apprentissage de la citoyenneté.

    @fafouin1

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  2. Tu as raison. L'apprentissage de la citoyenneté, tout comme celui de la sexualité, ne peut pas se passer de la pratique. Les connaissances intellectuelles aident à progresser, mais ne peuvent pas se substituer à l'expérience vécue. On s'entend là-dessus. ;-)

    Mais l'école est le lieu qui est privilégié pour indiquer aux prochaines générations quelles sont les connaissances à conserver pour l'avenir. Pour illustrer ce que je veux dire, je me rappelle avoir été médiocre en histoire et en philo. Mais quand je me suis mis à m'intéresser à la politique l'an dernier, je savais que l'œuvre de Platon serait éclairante pour moi, parce que j'avais lu un court extrait de la République dans un cours obligatoire au cégep.

    À notre époque, nous sommes submergés d'informations et nous avons des outils puissants pour fouiller tous les recoins d'Internet. Mais le citoyen moyen veut pouvoir se fier sur quelques sources reconnues, comme un journal, un bulletin de nouvelles, un magazine ou un politicien. L'éducation, je pense, est là pour permettre aux jeunes de comparer ce qu'ils apprennent à l'école avec les informations auxquelles ils sont exposés ailleurs, que ça vienne des médias ou même de leurs proches.

    Nous nous entendons donc pour dire que la politique est déjà enseignée à l'école au Québec et qu'il a été possible pour au moins un citoyen (moi) de s'en servir pour comprendre la situation politique actuelle. Tu dis qu'il faut trouver une autre piste pour la solution. Je suis d'accord. Il y a beaucoup de choses qui peuvent être améliorées en aval de l'éducation obligatoire. Par exemple, on peut demander aux médias de rehausser la qualité de leur couverture de l'actualité. Ou encore demander aux politiciens de penser davantage à l'ensemble de la société. On peut demander aux élites économiques de s'ouvrir à de nouvelles façons de penser. En fait, je rencontre plein de gens qui possèdent une partie de la solution mais qui ne s'en rendent pas compte.

    Ce que je sais, c'est que les plus jeunes sont aussi les plus ouverts d'esprit et les plus sincères lorsqu'ils réclament la paix et la concorde. Je commence à vieillir et peu de gens de ma génération sont politisés.

    J'insiste sur l'éducation parce que si l'école s'écarte de sa vocation de former des citoyens entiers et devient doctrinaire, les jeunes vont s'en rendre compte et décrocher dans leur tête si non physiquement.

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